Les troubles bipolaires se caractérisent, en phase aiguë, par une alternance d’épisodes dépressifs et maniaques avec une intensité émotionnelle très forte et parfois difficilement gérable. Véronique Delvenne, professeure de pédopsychiatrie à l’ULB et cheffe du service de pédopsychiatrie à l’Hôpital Universitaire des Enfants Reine Fabiola (HUDERF), dresse les contours de cette maladie dont les premiers signes peuvent survenir dès l’adolescence.
Commençons par qualifier le sujet dont on parle : les troubles bipolaires entrent dans le cadre des pathologies mentales et relèvent donc de la psychiatrie. Jadis appelée « maniaco-dépression » ou « psychose maniaco-dépressive », la maladie bipolaire se déclenche généralement entre 15 et 30 ans avec une prévalence pratiquement identique chez les femmes et chez les hommes.
Engagée en France pour une meilleure prise en charge de la santé mentale en France, la Fondation FondaMental estime qu’entre 1 et 2,5 % de la population française est concernée par les troubles bipolaires.
La Prof. Delvenne explique que le diagnostic d’un trouble bipolaire ne peut être posé qu’à partir de deux épisodes nets : un épisode dépressif et une période maniaque. Cela peut donc prendre un certain temps. « Lorsque la maladie débute par un état maniaque durant l’adolescence, il est souvent difficile de la distinguer de la schizophrénie, car les symptômes peuvent être assez semblables : délires, hallucinations, excitabilité, comportement excessif, etc. ».
Les causes de la maladie sont multifactorielles, mais les facteurs génétiques jouent très certainement un rôle déterminant. Les risques de la développer sont en effet plus élevés si d’autres membres de la famille sont atteints d’un trouble bipolaire. Le déclenchement de la maladie peut être lié à des facteurs environnementaux : stress, fatigue, choc émotionnel, consommation d’alcool ou de drogue… autant d’éléments susceptibles de jouer le rôle de détonateur.
Contrairement à ce que l’on pourrait croire (et à ce que certaines caricatures laissent paraître), souffrir de troubles bipolaires n’a pas pour conséquence de passer du rire aux larmes en un claquement de cils. Il s’agit d’épisodes (parfois longs) de périodes de dépression et de périodes d’excitations maniaques. Entre ces deux manifestations aiguës de la maladie, le patient se trouve en état d’euthymie, c’est-à-dire qu’il n’affiche pas de symptômes particuliers.
« Le traitement des troubles bipolaires passe par la prise de thymorégulateurs permettant de stabiliser l’humeur, explique la Prof. Delvenne. La bipolarité est en effet une maladie chronique dont on ne guérit pas, mais que l’on cherche à stabiliser comme c’est le cas pour le diabète ou l’hypertension artérielle. Elle exige donc un suivi rigoureux du traitement et un suivi psychiatrique régulier sur le long terme. Mener une vie familiale, sociale et professionnelle peut parfois se révéler compliqué, mais de nombreux patients y parviennent néanmoins très bien. »
« L’épisode maniaque est l’état psychiatrique le plus aigu et le plus impressionnant, déclare la Prof. Véronique Delvenne : euphorie, délires de grandeur, hallucinations, sexualité débridée, achats compulsifs, etc. L’état d’excitation est tel que le patient ressent à peine le besoin de dormir. Si cette période est ressentie par lui comme exaltante, elle témoigne d’une totale perte de contrôle. L’épisode maniaque nécessite souvent une hospitalisation contrainte pour protéger le malade des conséquences de ses actes. »
La prise en charge repose, outre la relation thérapeutique au psychiatre, sur la prescription de médicaments antipsychotiques, avec pour objectif d’atténuer l’ampleur des symptômes.
Comme c’est le cas lors d’une dépression « classique », une période dépressive liée à la bipolarité se manifeste par :
Un sentiment de tristesse intense
Une fatigue intense
Des troubles du sommeil ou de l’appétit
Des pensées suicidaires
Le traitement prescrit est alors constitué d’antidépresseurs, c’est-à-dire le même que lors d’une dépression classique chez un individu ne souffrant pas de troubles bipolaires, soit sur l’utilisation de traitements combinés (thymorégulateurs, antipsychotiques et antidépresseurs).
Le suicide est le principal risque lié aux troubles bipolaires puisque près de 20 % des patients décèdent de cette manière. Les tentatives de suicide surviennent bien entendu surtout lors des phases dépressives, mais les phases maniaques peuvent aussi se révéler dangereuses en raison des comportements impulsivement dangereux qu’elles impliquent.
« Si le pronostic lié aux pathologies psychiatriques reste très réservé, un dépistage précoce est essentiel pour augmenter les chances d’une prise en charge efficace des troubles bipolaires, conclut la Prof. Delvenne. Une vie saine réduit aussi les risques de phases aiguës. Et plus il y a de rechutes, plus la maladie risque de progresser. »
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