L'horloge interne est le chef d'orchestre de notre organisme. Elle régule tous nos rythmes circadiens, dont le cycle éveil / sommeil. Elle peut être désynchronisée par le changement d'heure, le décalage horaire ou l'exposition différée à la lumière naturelle ou aux écrans. Tentons de comprendre son fonctionnement.
Comment fonctionnent et sont régulés les cycles circadiens et quel est le rôle de l'horloge biologique ?
Du Latin “circa” (près de) et “diem” (jour), circadien signifie “proche d’un jour”. Un rythme circadien est donc un cycle de +/- 24h. Presque toutes les fonctions de l’organisme fonctionnent en cycles circadiens. Ces rythmes sont endogènes, c’est-à-dire qu’ils sont générés par l’organisme lui-même en cycles d’à peu près 24h (24h10 en moyenne, et entre 23h30 et 24h30). Par contre, ils sont synchronisés sur 24h par des éléments extérieurs, que l’on appelle des synchroniseurs externes : la lumière et l’organisation des jours en sont les principaux.
Le cycle éveil/sommeil est le rythme circadien le plus connu, mais il y en a un tas d’autres: la température corporelle, la production d’hormones, la fréquence cardiaque, la mémoire, la pression artérielle etc. fonctionnent également, comme presque toutes les fonction de l’organisme, en rythmes circadiens. L’étude de ces rythmes biologiques est la chronobiologie.
On sait par exemple que la température du corps est la plus élevée vers 18h et la plus basse vers 4h. Que la vigilance est à son comble en milieu de matinée (10-11h) et en début de soirée (19h), pour retomber à son niveau le plus bas vers 3h du matin. Aussi, le système digestif est généralement mis en pause entre 22h et 8h et la mélatonine (l’hormone du sommeil) fait son œuvre pendant ces heures.
L’horloge interne ou horloge biologique, c’est le chef d’orchestre qui régule tous les rythmes circadiens des fonctions vitales. Logée dans le cerveau, au niveau de l’hypothalamus, l’horloge interne est l’ordinateur central qui envoie des signaux aux zones de commande des diverses fonctions comme l’appétit, le sommeil, la température corporelle, le système hormonal, le métabolisme, etc. C’est donc elle qui régule la sécrétion de mélatonine en fin de journée, met le système digestif en pause la nuit, etc.
Aussi, chaque fonction biologique importante - on parle ici du cœur, des reins, du foie, des poumons, etc. - est gouvernée par une horloge périphérique, ce qui lui permet ainsi d’adapter son activité au cas par cas. Par exemple, en cas de travail de nuit, d’alimentation riche, d’activité physique intense…
Ce rythme qui définit l’alternance entre les phases d’éveil et de sommeil est le rythme circadien le plus connu, car il a le plus d’impact sur notre vie. Ici, l’horloge interne va contrôler la sécrétion de mélatonine. Le taux d’hormone du sommeil augmente en fin de journée avant le coucher pour favoriser l’endormissement, atteint son pic en pleine nuit entre 2 et 4h du matin, puis diminue graduellement pour être quasi nulle au petit matin.
Bien que de nombreuses études* aient démontré que ce rythme était intrinsèque à l’individu, la lumière naturelle influence ce cycle. En effet, ce rythme est assez similaire chez tout le monde et calqué sur le jour et la nuit.
*Des expériences ayant plongé des personnes dans le noir pendant plusieurs jours et sans repère de temps ont montré que leur cycle éveil/sommeil continuait de durer +/- 24h.
On l’a donc vu, un rythme circadien est d’à peu près 24h et varie d’un individu à l’autre. Cependant, l’organisation du monde extérieur, calée sur 24h, et la lumière jouent un rôle prépondérant dans la synchronisation des rythmes de chacun sur ‘24h chrono’.
Comment? En agissant sur les photo-récepteurs présents dans l’oeil, la lumière envoie un signal au cerveau, à l’horloge interne, et active la sécrétion d’hormones qui jouent sur l’humeur et l’activité. Lorsque le corps manque de lumière, il va produire plus de mélatonine. C’est pourquoi on peut ressentir une fatigue quand on est moins exposé à la lumière naturelle, notamment en début d’hiver.
Suivant la même logique, s’exposer le matin peut avancer l’horloge interne et une exposition le soir, à la lumière des écrans, peut la retarder et provoquer des troubles de l’endormissement. C’est aussi grâce à la lumière et à l’alternance jour/nuit que le corps va s’adapter aux changements d’heure et aux décalages horaires.
Une mauvaise régulation des rythmes circadiens peut avoir un impact sur la santé, ce qu’on appelle alors les troubles du rythme circadien. Ils peuvent être de nature diverses et avoir des conséquences sur le sommeil, l’appétit, l’humeur, le système cardiovasculaire ou immunitaire... et être source de nombreuses maladies comme le stress, la dépression, l’obésité, le diabète, les maladies cardiovasculaires, etc.
Qu'est-ce qui peut perturber l'horloge interne et éventuellement provoquer des troubles du rythme circadien ?
Le rythme circadien étant calé sur 24h, il est perturbé si l’on ajoute ou retire une heure au compteur. C’est pourquoi l’organisme est désorienté lorsqu’il y a changement d’heure ou si l’on traverse plusieurs fuseaux horaires lors d’un voyage (syndrome du décalage horaire ou jet lag). L’on gardera pendant certains jours - le temps de s’adapter - ses ‘vieilles’ habitudes: on ne dormira pas une ou plusieurs heure.s en moins ou en plus, mais on se réveillera plus tôt ou plus tard, tout comme on n’aura pas faim aux heures habituelles, etc.
Une étude financée par l’Union Européenne (EUCLOCK) a démontré que le changement d’heure peut vraiment perturber les rythmes circadiens de l’organisme pendant plusieurs jours. Particulièrement lors du passage vers l’heure d’été, car en plus de passer le rythme à 23h, ce changement implique la perte d’1h de sommeil. Cet impact sera plus puissant sur ceux qui ont déjà tendance à se coucher et à se lever plus tard. L’heure de sommeil supplémentaire à l’automne semble minimiser ces inconvénients.
Certains scientifiques considèrent d’ailleurs que le passage à l’heure d’hiver ou d’été peut être plus néfaste pour l’organisme qu’un décalage horaire lié au changement de fuseaux horaires lors de longs voyages. En effet, le changement d’heure n’est généralement pas synonyme de modifications des habitudes ou de l’activité, ce qui est par contre bien le cas quand on part en ou qu’on rentre de voyage. Lors du changement d’heure, toutes les activités qui sont considérées comme des repères (lever, coucher, repas,...), doivent être décalées alors que le temps de lumière et la zone géographique ne changent pas.
Les personnes les plus sensibles à ce changement d’heure ou décalage sont les personnes âgées, les enfants (et en particulier les bébés) et les personnes affaiblies par une maladie, car ils auront plus de mal à s’adapter à ces changements.
Plusieurs aspects de notre vie moderne sont susceptibles d'altérer nos rythmes circadiens et de dérégler l'horloge interne.
Il est tout à fait possible de réguler notre horloge interne afin de remédier à certains troubles. Le but est alors de resynchroniser notre organisme sur le rythme jour/nuit.
Tout simplement, en s’exposant plus à la lumière, qu’elle soit naturelle ou simulée par une lampe de luminothérapie. En agissant comme inhibiteur de la mélatonine - c’est-à-dire qu’elle va empêcher (une partie de) sa sécrétion - elle améliore l’état de veille et de vigilance. Elle joue également sur l’humeur en favorisant la sécrétion de sérotonine, l’hormone de la ‘bonne humeur’. On vous dit tout sur la luminothérapie ici.
Apprendre à bien dormir, c'est possible en respectant quelques règles d'or.
Manger équilibré et à horaires réguliers va permettre à l'organisme de se réguler. La pratique d'une activité physique est également conseillée, car elle libère des endorphines et permet d'avoir un sommeil de meilleure qualité. Enfin, passer moins de temps devant les écrans, surtout en soirée, est une bonne idée. Pourquoi ne pas entamer une détox digitale progressive ?